•  

     

    Cette semaine ABC est à la barre des croqueurs de mots, la communauté de Pascale, et nous propose :

     

     

    Défi n° 49 "UN MÉTIER À VOS MESURES"

     

    Au royaume de l’imaginaire les nouveaux métiers sont multiples.

    Je vous propose donc de créer le vôtre. Vous lui donnerez un nom, puis vous nous décrirez en quoi il consiste, tout en développant les qualités nécessaires pour exercer ce métier.

    Soyez originaux, inventifs et, pourquoi pas, audacieux.

    (Pour donner envie de l'exercer, soyez aussi percutants, évitez les longueurs)

     

    Un métier féérique

     

    pers448.gif

     

     

    Je fais vraiment un beau métier, qui me fait côtoyer une clientèle d’exception, dans tous les sens du terme.
    Je suis esthéticienne pour fées. Très exactement je m’occupe principalement des soins des ailes, et croyez-moi c’est une clientèle exigeante !
    J’ai un cabinet privé, au beau milieu d’une forêt, et ma foi, je commence à recevoir beaucoup de monde. Les rendez-vous se prennent à l’avance maintenant, après des débuts modestes.
    Des fées, il y en a de toutes sortes, la plupart vivent malgré tout dans un milieu naturel, où l’on se salit beaucoup, et une simple douche ne suffit pas pour un membre aussi complexe et délicat qu’une aile. Les fées installées en ville, ont elles affaire à la pollution et à la poussière, qui ternissent leurs belles couleurs et la transparence des membranes.
    J’ai un fauteuil spécial, avec un dossier bas, prolongé d’un bac très allongé, un peu comme les coiffeurs, mais tout en longueur, et un appuie-tête. Ma cliente s’assied, allonge ses ailes et se détend.
    Il y a d’abord une douche, eau tiède, avec une  base lavante très douce, pour bien tout ôter des salissures possibles. Puis rinçage. Il faut vraiment faire attention à ce stade, pour éliminer toute trace de savon, certaines fées ont des ailes vraiment très nervurées, très complexes.
    Et bien sûr il ne faut pas faire mal, ni risquer de déchirer des tissus parfois très fins, ce qui fait leur beauté, mais également leur fragilité.
    Ensuite, selon la demande, après séchage, je fais un massage avec une lotion adoucissante et hydratante. Je compose moi-même mes mélanges, à base de produits naturels bien sûr, où je mêle les parfums de fleurs, et de plantes. En ce moment, le grand succès est une eau à la rose et à la cannelle, sans oublier celle au romarin et sauge, un classique. Parfois, il faut ajouter une poudre brillante, pour une soirée, une réunion. Enfin, j’ai un linge tout à fait spécial qui améliore la transparence, en faisant briller, mais chut, c’est mon secret, je ne vous en dirai pas plus.
    Mes clientes les plus étonnantes ? Une fée des fleurs, absolument ravissante, et très  gentille, mais minuscule ! Elle devait faire 20 centimètres de haut. Je vous laisse imaginer la difficulté des soins ! Elle a été contente, après avoir bien ri en me voyant armée de mes lunettes loupes grand angle, et elle m’a envoyé beaucoup de monde.
    Une autre ? Une fée de la classe Carabosse. Pas facile là non plus ! Pas d’ailes dans son cas, mais elle voulait un masque facial, soins cheveux etc … Je n’étais pas tranquille au début, surtout avec un panier d’où sortaient des sifflements bizarres, mais ça c’est très bien passé.
    Je commence à devoir refuser du monde, et je serais heureuse de former des collègues, alors, n’hésitez pas, envoyez-moi vos candidatures !

     


    9 commentaires
  • Cette quinzaine, pour le défi N° 32 des croqueurs de mots, la communauté de Pascale,

    Nounedeb, la capitaine en poste a choisi de nous transformer en reporters, et d'imaginer une plage, des grands-parents, la mer ...

     

    Ce récit que je propose a une fin alternative, à vous de me dire laquelle vous préférez .. 

     

     

    La maison du bout du monde

     

    Mon journal m’avait envoyé dans cette petite ville de bord de Manche pour faire un reportage sur la fête de la mer. Je ne suis qu’un modeste journaliste et ce qui m’est confié est tout aussi modeste, néanmoins la perspective d’une journée au bord de l’eau m’avait fait plaisir.
    Arrivé sur place, j’avais trouvé l’ambiance agréable et gaie. Il y avait foule sur le port, comme sur la plage, pour voir les bateaux de près avant leur sortie en mer, ou bien regarder le défilé à quelque distance de la plage, suivi de la cérémonie religieuse.
    Une foule bigarrée et joyeuse, paisible, où se mêlaient les rires des adultes et les cris des enfants, déambulait. Beaucoup de grands-parents aussi, et j’en profitais pour poser des questions aux plus âgés sur les traditions entourant cette fête.
    J’ai attendu sur la plage, tout au bord de l’eau où une minuscule vaguelette s’ourlait, tant la mer était calme et bleue ce jour là. Les bateaux de pêche sont sortis en file, décorés comme je l’avais vu dans le port, de fleurs multicolores, faites de papier crépon, monté sur du fil de fer, tâche exécutée par les épouses des marins. Ils ont paradés le long de la plage, accompagnés par quelques plaisanciers, en faisant résonner leurs cornes. Puis le silence s’est fait, et les navires se sont rassemblés en un cercle grossier, entourant celui où le prêtre de la paroisse était embarqué, pour un court office et une prière. Silence aussi sur la plage, pendant ce moment solennel, bien qu’il soit impossible d’entendre les paroles de l’officiant. Seul résonnait discrètement le bruit de mon appareil photo, muni de son téléobjectif.
    Une gerbe de fleurs fut lancée à l’eau et toute la flottille reprit le chemin du port.
    Encore quelques clichés là-bas, montrant les marins distribuant les fleurs aux promeneurs, et mon reportage était bouclé.
    Il était encore tôt dans l’après-midi, mon train n’était prévu que pour nettement plus tard, j’avais quelques heures à tuer. Pris d’une sorte de mélancolie, en me retrouvant seul après cette agitation colorée, j’ai décidé d’aller marcher un moment, plutôt que de rester dans un café à ruminer sur l’appartement vide qui m’attendait au retour.
    Mes pas m’ont tout naturellement conduit sur la falaise, et après avoir gravi avec lenteur un chemin escarpé, je me suis retrouvé tout en haut, à respirer un air venu tout droit du large, sentant seulement le sel et l’iode, en regardant une mer bleu profond à perte de vue.
    Revivifié, j’ai marché un moment tout droit devant moi, et c’est un peu plus loin que je l’ai vue. Une maison ancienne, dans le plus pur style normand, avec un toit de chaume, presque au bord de la falaise, et assez isolée. J’ai été comme aimanté, et je me suis approché. De près, elle n’était pas aussi belle que je l’avais cru de prime abord. Elle était même assez délabrée, et bardée de panneaux d’agence signalant sa vente. Quel dommage, ai-je pensé, elle mériterait d’être remise en état.
    L’intérieur était-il en ruine ? Il fallait que je rentre, c’était devenu impératif. A l’arrière une porte était mal fermée. Je me suis demandé depuis si …
    Je suis entré, et j’ai parcouru les pièces blanches de poussières et de toiles d’araignées. Je suis monté à l’étage, j’ai vu les trois chambres, le grenier.. Il y avait beaucoup à faire c’était certain, mais cela n’avait aucune importance.
    Pour presque la première fois de ma vie, je me sentais bien, avec le sentiment d’être là où je devais être. Puis, très vite, des images sont venues, se superposant à la réalité, mon imagination courant librement. J’imaginais des gens, une famille, en vêtements des années 1900, dans un décor fait de bibelots, de cuivres, de tableaux , illuminé par le soleil entrant par les fenêtres débarrassées de leur couche de crasse. Il y avait des enfants qui jouaient, et une jeune fille radieuse. Tout paraissait si réel … J’ai dû m’arracher à ma rêverie pour sortir, avec l’impression de laisser mon cœur derrière moi. Au dehors, même le soleil du mois d’août paraissait terne, il fallait que je retourne prendre mon train. Dans la maison la plus proche, ou plutôt dans son jardin, une femme allongée dans un transat m’a fait un sourire. Elle avait dû me voir entrer, et sa mine était espiègle.
    – La maison du bout du monde vous plait ?
    – Du bout du monde ?
    – On l’appelle comme cela à cause de son emplacement.
    – Elle a dû être belle ?
    – Sûrement, mais elle est abandonnée depuis si longtemps.. C’était la maison d’une famille respectée et aimée au début du siècle, et puis la grande guerre est passée ; le fiancé de la fille aînée a été tué dans les tranchées, et elle n’avait plus la volonté de résister à la grippe qui a suivi. Ce qui restait de famille s’est dispersé, et la maison est passée de mains en mains depuis tout ce temps, jusqu’à être vide maintenant. Entrez un moment, je vais vous montrer de vieilles photos, je suis une cousine éloignée de cette famille..

    J’ai acheté comme j’ai pu la maison, à un propriétaire trop heureux de s’en débarrasser, et avec mes maigres économies, j’ai fait quelques travaux de remise en état, le strict minimum, le reste je le fais moi même.
    Ca ne fait rien. Les visions gagnent en intensité de jour en jour, prennent de l’épaisseur, de la consistance. Hier la jeune fille m’a souri, et dans le miroir qui était suspendu au mur de cet autre monde, j’ai vu le reflet d’un homme qui me ressemblait.
    Je suis revenu chez moi, et bientôt je serai avec les miens.

     

    ……….

     

    – Entrez un moment, je vais vous montrer de vieilles photos, je suis une cousine éloignée de cette famille.
    J’ai regardé l’album jauni, ou plutôt je l’ai dévoré. Tous semblaient si heureux, et la maison était si belle. J’étais si absorbé que j’ai sursauté en entendant le bonjour énergique d’une jeune femme, la fille de mon hôtesse. Toutes deux se sont amusées de mon ébahissement en voyant une des photos prendre vie, car elle ressemble trait pour trait à sa lointaine parente, morte si tristement.

     Nous avons acheté ensemble la maison, avec le peu que nous avions, et notre habitat ressemble plus à du camping qu’autre chose, mais ça nous est égal, nous avons le temps, et nous sommes heureux.
    Je ne lui ai pas parlé des visions du premier jour, et celles-ci ne sont pas revenues. Pourtant je n’oublierai jamais le sourire que me fit cette lointaine parente de mon épouse, et mon reflet près d’elle dans un miroir qui n’existait que dans ce monde lointain.
    Nous sommes rentrés chez nous.


    8 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique